Les kacho-ga ou les estampes de fleurs et d'oiseaux

Les kacho-ga ou les estampes de fleurs et d'oiseaux

Nous avons déjà évoqué les kacho-ga, ces estampes représentant des oiseaux et des fleurs, dans un précédent article sur la nature dans les estampes japonaises. Regardons ici de plus près ce qu'était ce genre, si apprécié dans l'art japonais.

Tout d'abord, il faut entendre ce terme au sens très large car si il concernait au départ exclusivement les images d'oiseaux et de plantes, il inclut très vite des représentations d'insectes, de poissons, de mollusques ou de crustacés et de plantes de manière générale. Autrement dit, un ensemble beaucoup plus grand d'êtres vivants, à l'exclusion de l'être humain ou du paysage. 

On va retrouver dans le genre du kachō-ga, une manière toute particulière au Japon de voir la nature. Héritier des peintures chinoises huaniao hua, il s’épanouit pleinement dès l’époque d’Edo (1603–1868), et devient un thème développé par les artistes de l'ukiyo-e qui enchantera le public de l'époque jusqu'à aujourd'hui. 

Ce qui frappe, quand on regarde une estampe kacho-ga, c'est la composition à la fois simple et sensible, riche de détails, qui nous offre une description précise d'un mouvement ou d'une posture et surtout nous invite à ressentir l'esprit des êtres sur le papier. Un bourgeon de fleurs de cerisier, ou les branches nues de l'hiver, un oiseau prêt pour l'envol ou en attente, le souffle d'une brise ou la transparence de l'eau, tous ces détails agencés avec délicatesse sont là pour évoquer le temps d'une saison, le caractère éphémère de la nature mais aussi sa beauté et son harmonie.

La représentation des oiseaux ou autres habitants des forêts et campagnes, est toujours composée dans leur environnement mais l'artiste ne va pas chercher pas à figer la nature, mais à saisir un instant, à illustrer un moment présent avant qu’il ne disparaisse. L'art du kacho-ga est ainsi un équilibre subtil entre le naturalisme connu en Occident et une vision japonaise nourrie de poésie haikus et de la spiritualité shintoiste et bouddhiste. En effet, dans la culture japonaise, les deux religions se mêlent pour créer une vision du monde indissociable d'une esthétique ; contempler la nature c'est aussi méditer et reconnaître la beauté dans des moments très simples, une façon de comprendre la vie, fragile et précieuse.

Il ne s'agit pas seulement pour l'artiste de représenter le réel mais aussi de l'interpréter afin d'évoquer cet instant fugace qu'il va poser sur sa feuille. Il va porter une attention particulière aux détails du sujet principal au premier plan quand l'arrière-plan, reste souvent neutre ou « vide ». On retrouvera souvent des lignes composées en diagonale, un jeu sur l'asymétrie, l'oiseau ou le sujet principal est rarement centré, les branches ou les fleurs peuvent sortir du cadre ou couper l'espace. Et enfin cette utilisation du vide, au cœur de la composition des kachō-ga. Ce vide n’est pas un manque, mais évoque un silence visuel et il permet de relier les éléments entre eux, il crée la profondeur et nous donne le temps de regarder. 

Ces estampes, au charme si particulier, vont fleurir dés la fin du XVIIIe, en particulier grâce au talent de Harunobu puis de Koryusai, mais ce sont celles de Utamaro , au travers de son album le livre des insectes puis de cent et mille oiseaux : concours de kiyoka, qui vont rester les plus célèbres, elles nous offrent toujours aujourd'hui des instantanées de nature représentées avec une incroyable modernité. Bien-sûr les deux grands maîtres de l'estampe du XIXe, Hokusai comme Hiroshige, laisseront aussi un ensemble remarquable de kacho-ga, chacun avec son style propre. Et des artistes, peut être moins célèbres à la fin du XIXe, comme Kono Bairei et Imao Keinen avec ses albums des oiseaux associés aux quatre saisons, vont se consacrer à ce genre et nous laisser des portraits de fleurs et d'oiseaux superbes et si vivants ! La tradition des kacho-ga continuera tout au long du XXe, et tout particulièrement grâce à Koson Ohara qui, en prolongeant le genre, va le faire vivre avec virtuosité et laisser de magnifiques estampes au coeur du mouvement shin-hanga. 

Vous pouvez profiter de ces estampes si sensibles, en découvrant notre collection, elles vous sembleront familières tant elles ont influencé les arts décoratifs en Europe et en France depuis le japonisme du début XXe jusqu'à aujourd'hui, et on ne s'en lasse pas !  

 




 

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